octobre 13, 2024

Le combat des titans

Les Camerounais et tous ceux qui observent la scène politique de ce pays, voudront savoir ce qui sortirait du conseil d’administration extraordinaire de la société nationale des hydrocarbures (Snh), que son président, Ferdinand Ngoh Ngoh, par ailleurs ministre d’Etat, Secrétaire général de la présidence de la République a convoqué pour ce 24 juillet 2024.

Ce conseil d’administration extraordinaire devait se tenir initialement le 17 juillet 2024 à la direction générale de cette société d’Etat. Son administrateur directeur général, Adolphe Moudiki, s’est refusé d’accueil les membres du conseil dans ses locaux, parce que selon des informations recueillies à bonnes sources, l’Adg attendrait que Paul Biya, le président de la République lui prescrive des instructions par rapport à ce conseil extraordinaire.

Adolphe Moudiki fait instruire la sécurité de la Snh de ne laisser personne du conseil franchir la guérite du bâtiment pour ce conseil initialement prévu se tenir le 17 juillet dernier.

Pour contourner cet obstacle de tenir ce conseil en lieu prévu, Ferdinand Ngoh Ngoh a convoqué les membres à se réunir au secrétariat général de la présidence de la République le 24 juillet 2024. Selon des informations proches de l’entourage de Adolphe Moudiki, Ferdinand Ngoh Ngoh aurait tenté une ultime démarche auprès de l’Adg pour une conciliation, ce dernier a refusé de le recevoir.

Au Cameroun, un conseil d’administration d’une société d’Etat est souvent un prélude au limogeage du principal dirigeant. Celui de la Snh dérogerait-il à la règle ? Adolphe Moudiki est ami de Paul Biya de longue date. Il dirige la Snh depuis 1993, en bonne intelligence avec le chef de l’Etat. C’est une entreprise tentaculaire dont les bras de pieuvre couvrent les domaines du pétrole et des hydrocarbures. Par ses multiples participations dans ce vaste secteur, la Snh glane beaucoup d’argent. Elle apparait ainsi comme la vache à lait de l’Etat. Malgré les pressions des institutions de Bretton Wood de rendre sa gestion financière transparente, l’Etat du Cameroun s’est toujours arque-bouté à tenir hors du budget national, l’immense trésor de cette entreprise. Paul Biya, comme son prédécesseur Ahmadou Ahidjo, a toujours mis à la tête de cet empire, une personne de totale confiance et de discrétion au dessus de tout soupçon.

La multinationale anglo-suisse, Glencore, est un géant du négoce des minerais et des matières premières. En 2022, elle a été condamnée par la justice américaine pour corruption dans certains Etats africains. Des Camerounais de la présidence de la République et de la Snh notamment ont été cités parmi ceux ayant perçu des pots de vin versés par Glencore. Des enquêtes sont ouvertes. L’Adg de la Snh serait entendu. Chose très difficile pour une personne proche du chef de l’Etat, et qui a financé des dossiers délicats avec l’approbation du chef de l’Etat du Cameroun.  

Fatigué et miné par la maladie, Adolphe Moudiki serait-il lâché par son ami Paul Biya ? Si Ngoh Ngoh persiste à tenir ce conseil d’administration extraordinaire pour probablement faire déposer Moudiki, c’est qu’il aurait l’aval du président de la République, qui continue de tirer sur les ficelles dans son silence habituel. Quel rôle jouerait alors Chantal Biya dans ce difficile imbroglio ?  Ce serait un secret de Polichinelle d’affirmer qu’elle influence certaines décisions de son mari.

Que Ngoh Ngoh jouisse des appuis de la première dame, autant que Nathalie Moudiki, très présente dans la gestion de la Snh s’en réclame aussi, tout ceci fait que Chantal Biya se trouverait dans un dilemme cornélien. Les choses seraient moins opaques si le président de la République prenait ses responsabilités dans ses décisions assumées, et les expliquer ensuite à son peuple.  

L’option du silence et de la procuration prise par Paul Biya, favorise les interprétations multiples. Par ces silences, Adolphe Moudiki a tout compris : il n’est plus soutenu par son ami. Il devance les conclusions du conseil d’administration, au cas où elles ne lui seraient favorables.

Moudiki, lui homme d’honneur, il a pris vendredi le large, en se retirant dans sa luxueuse propriété de Poitiers en France. De là-bas, il apprendra par qui le conseil d’administration de la Snh aura décidé de le remplacer.

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