LES FAITS
Le 31 décembre 2024, Francis Hervé Eyalla, president exécutif d’une Ong appelée “ Réseau national des consommateurs du Cameroun” (Rnc) , écrit au directeur général du brasseur “Boissons du Cameroun ». C’est la nouvelle appellation de ce qui fut « Société anonyme des brasseries du Cameroun » (Sabc).
Francis Hervé Eyalla informe cette multinationale que : » Plusieurs consommateurs ont relayé à notre niveau l’information qui incrimine fortement le produit Booster whisky cola et avec des conséquences désastreuses sur la santé des consommateurs si jamais celles-ci s’avèrent vraies « .
Cette accusation est grave. Elle touche à l’image et à l’honneur d’une entreprise dont les produits sont directement destinés à la consommation humaine. Bien que l’acte d’accusation du Rnc ne s’accompagne pas des pièces à conviction des consommateurs abusés, les réseaux sociaux entrent dans la danse: la Toile s’enflamme des messages accusateurs, des plus farfelus aux plus sérieux. Boissons du Cameroun, par la plume de Stéphane Descazeaud son directeur général, réagit le même jour en ces termes : » Nous avons, de toute urgence, déployé nos services dans les zones concernées pour analyse et fort heureusement, rien de ce que nous avons pu lire sur les réseaux sociaux ne s’avère exact ».
Impm valide Booster whisky cola
Il va se poursuivre entre le Rnc et la direction générale de Boissons du Cameroun plusieurs échanges par correspondances. Le ton n’est pas à l’apaisement. D’un côté, Boissons du Cameroun est convaincue que son produit, Booster whisky cola est d’excellente qualité, comme d’ailleurs l’ensemble de ses produits qui passent par différentes chaînes d’analyses interne et externe, avant de les soumettre à la consommation publique. La preuve, l’Institut de recherches médicales et d’études des plantes médicinales, (Impm) une structure publique de référence qui est du ressort du ministère de la Recherche scientifique et de l’Innovation, avait été sollicité pour examiner Booster whisky cola. Au terme d’une analyse toxicologique du produit effectuée depuis le 02 Janvier dans son laboratoire de Contrôle qualité des aliments, Impm livre en date du 10 janvier 2025 ses conclusions :
« Ce produit semble à première vue ne pas être toxique lorsqu’il est administré à forte dose aux rats de laboratoire. En conclusion, il est satisfaisant selon les critères et paramètres analysés ».
Ce rapport provenant d’un laboratoire de haute réputation, aurait pu clore la controverse. Un cadre de Impm précise que, les rats en laboratoire sont utilisés pour des tests. Des réactions sur ces animaux seraient les mêmes sur des sujets humains. « Ces tests effectués avec un maximum de soins n’ont présenté aucun dégâts, donc cette boisson est propre à la consommation humaine » , affirme notre interlocuteur.
Cta-Cam contredit Impm
Le Rnc n’est pas de cet avis. Au moment même où Impm livre ses conclusions à Boissons du Cameroun, Francis Eyalla saisi à son tour le laboratoire du Cta-Cam. Le président de Rnc commande deux types d’analyses sur le produit Booster whisky cola. La première analyse concerne les aspects « physico-chimiques de la boisson », et le second sa « microbiologie ».
Pour la première analyse, le Cta-Cam recommande que soit mentionné sur l’étiquette de la boisson concernée, « la teneur en sulfites (qui est, Ndlr) supérieure à 10mg/l, car cette substance peut provoquer des allergies ou des intolérances ».
Pour la seconde, le laboratoire constate que » cette boisson alcoolisée est de qualité microbiologique satisfaisante selon les paramètres analysés ».
Le Centre technique agro-alimentaire est un groupement d’intérêt économique basé à Bali- Douala. Il fait des analyses sur des produits de consommation courante. Ce centre est agréé par le ministère camerounais de l’Economie, du Plan et de l’Aménagement du Territoire. Il fait des prestations scientifiques pour l’Union européenne, Onudi, Cameroon Business Forum ou le Bureau de mise à niveau des entreprises en réhabilitation que dirige Mme Chantal Elombat.
Le Rnc tient comme un trophée de guerre les conclusions des analyses effectuées par le laboratoire de Cta-Cam. Il écrit à Boissons du Cameroun le 15 janvier 2025. Il demande à être reçu le lendemain à 14 heures, dans les locaux de la multinationale à Douala, en vue de la restitution des résultats des analyses en laboratoire du Cta-Cam. Ce rendez-vous sollicité mentionne par ailleurs que le Rnc aura dans sa suite, 08 personnalités de haut niveau parmi lesquelles la Dgre et la Dgsn notamment. La composition de la délégation annoncée par Francis Eyalla intrigue et fait bondir la direction générale de Boissons du Cameroun où on s’interroge : » Que viennent faire les représentants des services d’espionnage et de sécurité dans une restitution des résultats d’analyse ? », s’interroge t-on là bas.
Cette restitution n’aura pas lieu. Benoît Mboula, le Sg de Boissons du Cameroun s’explique: « Il y a des incongruités dans la démarche de Francis Eyalla. D’abord, il impose le rendez-vous, il choisi son heure, le lieu et la salle de la rencontre… Il ne tient même pas compte de nos agendas. Plus grave, nous ne pouvons pas comprendre la raison de la présence à cette rencontre des personnalités citées, y compris celles de la sécurité extérieure du pays ! ».
Une crise et une autre
Benoît Mboula en charge du dossier à Boissons du Cameroun est pourtant un personnage racé, affable et pondéré. Il sait recevoir ses visiteurs. Ce jour-là, Francis Eyalla et sa suite ne seront pas les bienvenus dans les locaux de la société. Benoît Mboula est chimiste formé à Polytechnique de Mons en Belgique. En 2006, il entre à Coca Cola à Anvers. Il arrive dans cette entreprise au moment où la boisson phare traverse une crise d’image la plus aiguë de son existence. Cette crise est provoquée par la qualité du produit contestée en Belgique. Coca Cola prend l’affaire très au sérieux. Avec ses conseils en communication de crise, la marque surmonte l’épreuve, rassure les consommateurs et retrouve sa sérénité.
Benoît Mboula en homme de terrain donc, voudrait échanger avec Francis Eyalla car il a vu des crises en entreprise. Il a contribué à leur résolution. Il voudrait mettre à profit son expérience pour le cas actuel. Il déplore malheureusement l’option conflictuelle de ses interlocuteurs du Rnc, au détriment du dialogue basé sur des éléments scientifiques factuels.
L’Anor contredit Cta-Cam
Boissons du Cameroun avait soumis Booster whisky Cola à l’analyse de l’Anor. Au terme de cette analyse, l’Anor remet à la multinationale un certificat de conformité et de qualité pour Booster whisky cola. Elle précise que: » Les analyses physiochimiques et micro biologiques effectuées par le Centre technique agroalimentaire, sans référentiel normatif, ni accréditation internationale et encore moins l’agrément de l’Anor, ne permettent pas d’accorder une crédibilité aux résultats fournis ». L’Anor informe par voie de conséquence le ministre du Commerce de ce que « cette boisson est propre à la consommation humaine « . Le ministre Mbarga Atangana » accuse réception de la correspondance et prend acte », sans plus.
Prenant connaissance des échanges entre l’Anor et le ministre du Commerce, Francis Tchounga Kameni, le directeur du Cta-Cam réagi :
» l’Anor représente les normes; elle ne réalise pas les tests en laboratoire. Elle n’a ni l’expertise, ni les équipements, ni la ressource humaine qualifiée pour cette mission . L’Anor devrait se limiter à la conformité de l’étiquetage du contenant, et travailler avec Cta -Cam pour la qualité du produit », fulmine t-il.
L’Anor a été créée le 17 septembre 2009 par un décret du président de la République. Elle est chargée de l’élaboration, de l’homologation des normes, de la certification de la conformité aux normes et à la qualité. Elle propose des mesures visant à améliorer la qualité des produits et services pour le respect des normes. Cet organisme public serait donc ainsi dans ses missions, en octroyant à cette boisson un certificat de conformité.
Le produit et l’image
Lorsque les premières alertes sont lancées sur les réseaux sociaux mettant en garde les consommateurs contre Booster whisky cola, la direction générale de Boissons du Cameroun publie aussitôt, le 31 décembre 2024 un communiqué pour rassurer les consommateurs de la bonne qualité de cette boisson, ainsi que de celle des autres produits du groupe. La dénonciation ne s’était pas arrêtée pour autant.
L’imbroglio entretenu entre Anor et Cta – Cam ne se fait pas pour arrêter et arranger les choses non plus. A la direction générale de Boissons du Cameroun, nous avons appris que cette dénonciation n’a pas eu un impact notoire sur les ventes de Booster whisky cola, soit. Cependant, il n’en demeure pas moins vrai qu’une dénonciation d’un produit de consommation humaine entraine toujours un regard de suspicion sur le produit. Ce regard suspicieux n’épargne pas l’image de l’entreprise. Boissons du Cameroun, quelle que soit la finalité de cette guerre des laboratoires, elle sera face à une double obligation: rassurer les consommateurs d’une part, lustrer l’image de la maison d’autre part.
interesting
Quelques précisions importantes :
1- Aucune toxicité n’est relevée ni par CTA, ni par les autres laboratoires
2- Vous aurez dû mentionner que la valeur du sulfite 10.2mg/l est largement inférieure au seuil autorisé qui est 250 mg/l.
3- Est-ce du ressort d’un laboratoire de porter critique sur l’étiquettage ? Ne dévrait-il pas produire des résultats et laisser les organismes habilétés en tirer des conséquences ?