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décembre 2, 2024
Ben Alya

Pr Nissaf Ben Alya, médecin tunisienne et directrice de l'Observatoire national des maladies nouvelles et émergentes.

Pr Nissaf Ben Alya, en sa qualité tant d’experte, tire les leçons de cette 2ème conférence, partant du passé et des priorités à adresser au sortir de ces assises pour la sécurité sanitaire en Afrique.

Qu’est-ce que la Covid-19 a laissé comme enseignement aux scientifiques ?

Il y a beaucoup de leçons. Cependant, la question qu’il faut se poser est de savoir, est-ce qu’on a vraiment appris la leçon ? On est passé par différentes crises et on n’a jamais appris la leçon. Nous avons eu la crise d’Ebola, la crise Sars-Cov, la crise H5n1. Il y a un certain nombre d’expériences vécues. Malheureusement une fois la crise passée, il semble qu’on oublie tout. On oublie nos priorités. Je pense que la crise Covid-19 est la crise sanitaire la plus importante que nous ayons eue dans l’histoire récente de la santé. Donc si on ne tire pas les leçons maintenant, je pense que notre monde et la sécurité sanitaire seront à nouveau mis à l’épreuve dans un futur que personne ne peut prédire.

Préparation, prévention, riposte

Pour moi, nos plans de préparation, de prévention, de riposte et de résilience aux maladies à potentiel épidémique doivent être révisés avec une nouvelle approche, mettant en priorité la coordination sectorielle et multisectorielle, en mettant l’accent sur la nécessite de renforcer nos capacités de diagnostique, de traitement et nos aptitudes à mettre en place nos programmes de prévention primaire telle que la vaccination.

Comment justifie t-on cette situation de non prévention ?

Je pense que c’est extrêmement difficile de la justifier. La situation sanitaire globale devrait être parmi les priorités. En fait, on doit investir dans la prévention, dans la préparation. Certes on peut ne pas voir l’idée et plutôt se tourner vers la médecine curative pour le traitement des patients ; et on n’investit jamais ou on n’investit pas assez dans tout ce qui est préparation et prévention. Le problème c’est qu’une fois la crise passée, on revient à des préoccupations quotidiennes du genre la prise en charge des patients et l’aspect curatif et on oublie la prévention.

Il faut une plus grande connaissance ou reconnaissance de la place de la prévention et de la préparation pour la prévention de futurs évènements. Il faut replacer la sécurité sanitaire globale au premier niveau des priorités et bien évidement, travailler sur la prévention et la préparation des crises sanitaires.  La prévention c’est en fait investir maintenant et continuer à investir dans la prévention. C’est ce qui va nous faire gagner énormément en matière de sécurité sanitaire et surement des vies seront sauvées par millions. Il s’agit d’assurer la prévention dans toutes ses composantes. De la prévention primordiale jusqu’à la prévention tertiaire.

Sécurité sanitaire globale

Par exemple, il faut se doter des structures d’isolement dans toutes les structures hospitalières, disposer de laboratoires de très haute technologie de faire le diagnostique Intra-muros, intra Afrique (sur le sol africain). Pourquoi attendre ? On a montré cette capacité lors de l’émergente des« Cov » en Afrique du Sud. Elle a été capable d’identifier le « Cov-delta »à temps.

Il ne faut pas aussi que l’Afrique soit marginalisée ou soit stigmatisée une fois qu’on déclare une crise. Il faut que ce soit une solidarité internationale pour éviter l’émergence de ces maladies. Il faut concevoir des plans, il faut faire des simulations pour voir ce qui fonctionne ou pas. Maintenant on doit arrêter cette rupture entre tout ce qui est prévention et médecine curative. La prévention, la santé publique, la préparation sont des éléments très importants pour arriver à la sécurité sanitaire globale qui nécessite aujourd’hui une coordination multisectorielle et multinationale.

Que doit-on faire au sortir d’une rencontre comme cette 2nde Conférence internationale ?

On doit tout de suite identifier quelles sont les priorités d’action en Afrique, les difficultés d’action telles que identifiées par les différents pays, se mettre autour de ces priorités d’action par exemple qu’est ce qui a marché pour le renforcer, qu’est ce qui n’a pas marcher pour apporter des mesures correctives et les mettre en œuvre immédiatement. Donc il y a encore un intérêt international par rapport à cette pandémie. Nous devons profiter de cette situation et nous mettre maintenant à réviser nos plans, à dresser un tableau des challenges et les défis, de toutes ces choses qui ont bouleversé notre système de santé.

Je reviens par exemple à la capacité de production locale d’oxygène pour les patients.  Il faut que cette capacité soit un acquis pour nos Pays. Il ne faut pas qu’en cas d’une prochaine crise, on rencontre le même problème. Maintenant on parle des maladies à transmission aérienne. Probablement demain, c’est d’autres maladies qui sans doute vont émerger. Il y aussi des maladies zoonotiques. Il faut que le secteur animal et le secteur de la santé se mettent ensemble pour y faire face. Ce que nous voulons faire, c’est des mises en œuvre réelles. On a plein de choses qui sont écrites mais leur mise en œuvre fait défaut.

Quelle lecture faites-vous du thème de cette conférence ?

L’Afrique a été victime d’une grande disparité par rapport à son système de santé. L’Afrique a été victime d’un accès limite, voire un accès retardé au vaccin, un accès limité à tout ce qui était salvateur. On n’a pas le même niveau d’intervention dans tous les pays d’Afrique à la croisée des chemins vers la sécurité sanitaire globale. Il faut que ce travail soit fait.  Il nous reste beaucoup de travail, l’Afrique ne peut pas le faire seule. Elle doit le faire avec tous les autres continents. Au même titre d’égalité.

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