juillet 25, 2024

Le parlement camerounais

Au Cameroun, le Parlement et la Justice sont aux ordres de Paul Biya. Les lois sont taillées sur mesure. La vie politique est concentrée autour d’un seul énorme parti, le Rdpc. Avec cet échafaudage institutionnel construit patiemment par et pour une seule personne, Paul Biya peut dire comme Louis XIV : « l’État, c’est moi ! »

Des historiens français ne s’accordent pas tous sur la paternité de cette formule apocryphe. Pour certains, c’est le roi Louis XIV qui, très agacé par le comportement des parlementaires parisiens qui contestaient les édits royaux, le roi prononça cette formule le 13 avril 1655 : « L’État, c’est moi ! ». Il n’avait que 17 ans. Il voulait par là rappeler aux parlementaires la primauté de l’autorité royale dans un contexte de défiance avec le Parlement.

Pour d’autres historiens cette phrase pouvait pas être du roi de France et de Navarre puisque, dans son lit de mort, le roi avait dit : « Je meurs, mais l’État demeurera toujours ». En revanche, la paternité de la formule reviendrait à Pierre-Edouard Lémontey dans son « Essai sur l’établissement monarchique de Louis XIV et sur les altérations qu’il éprouva pendant la vie de ce prince » paru en 1818. Dire que Paul Biya a tout d’un monarque ne serait pas lui faire offense. Le Cameroun a tous les habillages d’une démocratie, mais dans la réalité, il n’en est rien du tout. Le Parlement, l Justice, le Gouvernement, les Armées, c’est une seule personne qui régente toutes ces institutions. Paul Biya a ordonné́ l’arrêt des poursuites contre Basile Atangana Kouna, le reste de la machine s’est mise en branle. Aucun ministre, aucun juge n’aurait pris sur lui de faire appliquer la loi sur le cas Atangana Kouna sans s’en référer au prince, il aurait été aussitôt désavoué. L’Etat, c’est lui !

Paul Biya a lu Mazarin et Machiavel. Leurs ouvrages seraient ses livres de chevet. Ces deux penseurs latins du XVIIème siècle ont distillé de précieuses recettes aux dirigeants politiques anciens et actuels pour la conservation du pouvoir. Le premier conseille à tout homme politique de « ne jamais agir soi-même, mais de confier l’exécution des basses œuvres aux intermédiaires ». Le second recommande à l’homme politique « de se foutre de la morale s’il veut tenir son peuple en laisse ».

Si ces conseils ne font plus recettes dans des démocraties occidentales où les contre-pouvoirs sont vivaces, où la presse joue son rôle de chien de garde, en revanche, sous les tropiques, Mazarin et Machiavel font encore la pluie et le beau temps.
Au Cameroun, le Parlement et la Justice sont aux ordres de Paul Biya. Les lois sont taillées sur mesure. La vie politique est concentrée autour d’un seul énorme parti, le Rdpc. Avec cet échafaudage institutionnel construit patiemment par et pour une seule personne, Paul Biya peut dire comme Louis XIV : « l’État, c’est moi ! »

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