Rebecca Enonchong est interpellée à Douala et gardée à vue. Infraction à lui imputée : « outrage à magistrat ». Elle a été à plusieurs reprises déférée au Parquet, puis renvoyée chez les Officiers de la police judiciaire pour « compléments d’enquêtes ».
Elle est désormais libre grâce à une pression médiatique animée par certaines Ong. Rebecca Enonchong a bénéficié de sa notoriété ; elle compte parmi les « 50 femmes les plus puissantes d’Afrique », propriétaire de plusieurs entreprises qui ont pignon sur rue. Elle est la fille du célèbre regretté avocat Enonchong qui a laissé une fortune immense. C’est peut-être pour cette raison qu’elle a été gardée à vue.
Dans ce milieu où l’efficacité est le maître mot, la recherche des preuves est systématique. On n’est pas à l’abri de tous les abus, le suspect devra être présenté au procureur de la République qui, à sa meilleure convenance, sanctionne la fin des enquêtes préliminaires.
Un vieil avocat et non des moindres, commentant cette actualité, a parlé des « weekends de tous les dangers » : on vous interpelle le jeudi, le lendemain vendredi, on vous défère et on vous place sous mandant de détention provisoire ou alors on vous retourne dans les cellules nauséabondes et non éclairées des brigades de gendarmerie ou des unités de police. Le weekend, la famille prépare le chèque et le lundi suivant, vous êtes élargi.
Combien sont-ils, ces anonymes détenus qui bénéficient de la liberté provisoire prononcée par le juge du fait de leur état de santé précaire pour aller se faire soigner, sans être sorti de prison parce que le parquet a fait appel ? nous savons que dans cette matière, l’appel n’est pas suspensif de la décision de mise en liberté. Ils sont nombreux de mémoire de chroniqueur judiciaire, ces prévenus qui ne se sont plus présentés à l’audience suivante parce que décédés. La garde à vue, précaution à priori fondée sur une logique d’hypothèses, suffit déjà à transformer le suspect en coupable déclaré.
Les interrogatoires se succèdent au mépris de la loi, des aveux sont extorqués à la faveur de la fatigue. L’enquêteur n’est pas là pour écouter dans une vague neutralité ; il doit marquer les coups, épouser les passions des partis, enfin prononcer une sentence. Parfois sous l’égide d’une intime conviction pervertie par l’intérêt ou aliénée par les sentiments.
Loin pour nous de jeter l’opprobre sur un corps : la magistrature dont la notoriété va au-delà du triangle national. Cependant, nous sommes en droit de dénoncer ceux des brebis galeuses qui ternissent l’image de la magistrature camerounaise. Ceux-là qui conditionnent votre liberté par le versement d’une caution dont ils ne vous délivrent aucun reçu.
Loin pour nous de trainer dans la boue nos brillants officiers de police judiciaire (police, gendarmerie). Mais il nous échoit de stigmatiser ceux d’entre eux qui pour une affaire civile qui découle d’une plainte, refusent de se déclarer incompétents. Ils convoquent le suspect, le placent immédiatement en cellule en attente de la réaction de la famille.